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2.2. Spécificités du génie végétal en montagne
2.2.1. Le génie végétal en montagne : des modèles naturels particuliers
2.2.1.1. Une structuration de la rive particulière
Les milieux alluviaux et les berges de cours d’eau présentent une végétation spécifique en montagne. Les types de végétation vont dépendre du régime hydromorphologique, de la zone climatique, de l’altitude, de la géologie. Les différents modèles végétaux présents sur les berges de cours d’eau sont décrits dans la partie III de ce guide.
Le cortège des ripisylves et notamment les espèces de saules vont ainsi varier en fonction de l’altitude. Certains de ces saules de montagne ont des capacités de bouturage intéressantes comme Salix daphnoides ou S. myrsinifolia, d’autres comme S. appendiculata sont plus difficiles à utiliser sous forme de boutures, de plançons ou de couches de branches.
On peut également noter la présence de blocs et d’« enrochements naturels » sur la berge de certaines rivières torrentielles et des torrents (fig. 8 et 9). La présence de ces structures minérales dans les berges augmente avec la pente des cours d’eau.
En milieu montagnard, le type de végétation présent est souvent spécifique. Les espèces herbacées et ligneuses de plaine (dont certains saules) ne sont pas forcément adaptées à l’altitude. Il y a donc lieu d’accorder une vigilance particulière aux espèces utilisées pour la revégétalisation, et s’assurer de leur bonne adéquation aux conditions de milieu, notamment en ce qui concerne l’altitude. La partie III donne ainsi les caractéristiques des espèces utilisables pour le génie végétal en berges de cours d’eau, tant en termes d’exigences de milieu que de modalités d’utilisation en génie végétal. Ces notions sont largement détaillées dans la partie III du guide.
2.2.1.2. Quelle définition du génie végétal en altitude ?
Si on reprend la définition du génie végétal donnée en I.3.1 de cet ouvrage, sont considérés comme des ouvrages de génie végétal ceux pour lesquels les végétaux assurent une fonction de stabilisation mécanique. Les ouvrages dans lesquels les matériaux inertes assurent les fonctions de stabilisation mécanique, comme les enrochements végétalisés, sont alors appelés génie biotechnique.
Cependant, cette définition peut poser problème en ce qui concerne les rivières à forte pente. En effet, un des objectifs du génie végétal est de copier les modèles naturels qui fonctionnent. Il s’agit généralement de s’inspirer des structures végétales présentes à proximité des ouvrages et qui sont stables vis-à-vis de l’érosion (chap. I.3.1). Or, sur les rivières et torrents à forte pente, les berges de cours d’eau sont souvent naturellement constituées de blocs et de végétation entremêlés, donc d’« enrochements végétalisés naturels ». Ainsi, si les enrochements végétalisés ne peuvent pas être considérés comme des ouvrages de génie végétal en rivière de plaine, la question se pose bien différemment sur les rivières à forte pente.
2.2.2. Problématique liée à la végétation
2.2.2.1. Des conditions qui influencent la croissance des végétaux
En montagne, la période de végétation diminue avec l’altitude sous l’effet de la baisse des températures et de l’augmentation de l’enneigement. Ainsi, les saules d’altitude débourrent plus tard et perdent leurs feuilles plus tôt que leurs cousins des plaines.
La vitesse de croissance des plantes décroît avec l’altitude ; cela peut d’ailleurs se vérifier sur les espèces présentes sur une large gamme altitudinale. Ainsi, en comparaison avec les saules de plaine, les saules de montagne ont une croissance plus lente. De par ces conditions de croissance, leur bois est plus dur, ce qui leur confère une meilleure résistance (dessiccation, battage, etc.). Leur bois est aussi plus difficile à couper lorsque l’on veut le prélever pour faire des boutures. Il est par ailleurs souvent moins rectiligne et moins souple. Les saules de montagne présentent donc des conditions de prélèvement et de mise en œuvre qui diffèrent de celles des saules de plaine (Duperray 2010).
Cette plus faible croissance des plantes en altitude va ainsi freiner le développement des ouvrages de génie végétal par rapport à ce que l’on peut observer en plaine. De plus, la résistance des ouvrages de génie végétal augmentant avec le temps, on peut conclure que la résistance des ouvrages de génie végétal en rivière de montagne augmente moins vite que sur les rivières de plaine.
2.2.2.2. Quelle origine pour les espèces utilisées ?
Souvent, faute de disponibilité ou pour des raisons pratiques, le matériel végétal utilisé pour la revégétalisation de zones de montagne provient d’autres zones géographiques, et notamment de plaine, où il est plus facile de le cultiver et de le prélever. Lorsque l’on utilise des boutures issues de zones éloignées, d’autres massifs, voire de plaines, on introduit des espèces et des variétés ou souches non indigènes. Ces dernières ne sont pas forcément bien adaptées aux contraintes du milieu ambiant. Pourtant, en zone de montagne, on est généralement dans des territoires avec une forte valeur patrimoniale, avec une végétation diversifiée qui présente des espèces ou des écotypes spécifiques. L’utilisation de souches locales apparaît donc comme primordiale, à la fois dans l’objectif d’utiliser un matériel végétal adapté aux conditions de milieu, que pour respecter le caractère patrimonial de ces milieux à forte typicité.
Les saules de montagne ayant une saison de végétation plus courte, leur utilisation pourrait apparaître comme une solution pour des chantiers de plaine précoces à l’automne ou tardifs au printemps (Duperray 2010). Ainsi, on pourrait avoir des saules en période de dormance à utiliser sur des chantiers où les saules locaux seraient encore ou déjà en végétation. Ceci dit, se pose là aussi le problème de l’indigénat et de l’adaptation des espèces et écotypes utilisés.
2.2.3. Périodes d’intervention
2.2.3.1. Contraintes hydrologiques
Dans les Alpes du Nord, on considère généralement trois types principaux de régime hydrologique.
Tout d’abord le régime glaciaire, qui correspond à des cours d’eau dont une part importante du bassin versant est alimentée par des glaciers. Ces cours d’eau connaissent des étiages hivernaux et de hautes eaux estivales. Ils sont aussi caractérisés par des variations de débit importantes entre le jour et la nuit, les débits nocturnes étant plus faibles.
Le régime nival, quant à lui, correspond à des bassins versants d’altitude où une part importante des précipitations tombe sous forme de neige. Il est caractérisé par de très fortes crues de printemps, liées à la fonte des neiges.
Enfin, le régime pluvio-nival se trouve dans des bassins versants à plus basse altitude. Ce régime est caractérisé par deux périodes de crues, l’une au printemps à la fonte des neiges, l’autre en automne ou en hiver. La prédominance de la crue d’automne/hiver est d’autant plus marquée que l’influence nivale est faible.
Tout d’abord le régime glaciaire, qui correspond à des cours d’eau dont une part importante du bassin versant est alimentée par des glaciers. Ces cours d’eau connaissent des étiages hivernaux et de hautes eaux estivales. Ils sont aussi caractérisés par des variations de débit importantes entre le jour et la nuit, les débits nocturnes étant plus faibles.
Le régime nival, quant à lui, correspond à des bassins versants d’altitude où une part importante des précipitations tombe sous forme de neige. Il est caractérisé par de très fortes crues de printemps, liées à la fonte des neiges.
Enfin, le régime pluvio-nival se trouve dans des bassins versants à plus basse altitude. Ce régime est caractérisé par deux périodes de crues, l’une au printemps à la fonte des neiges, l’autre en automne ou en hiver. La prédominance de la crue d’automne/hiver est d’autant plus marquée que l’influence nivale est faible.
Les variations de débit pendant la saison de végétation sont à prendre en compte dans la conception des ouvrages de génie végétal.
Dans le cas du régime glaciaire, la période de mise en place des ouvrages au printemps ou à l’automne correspond à des périodes où le débit n’est pas très élevé, ce qui est favorable au déroulement des chantiers.
Les crues de printemps sur les cours d’eau à régime nival sont préjudiciables si l’on souhaite installer les ouvrages de génie végétal à cette période. Elle risque en effet de se produire au cours du chantier, et donc d’empêcher sa bonne réalisation.
Sur les cours d’eau à régime pluvio-nival, les risques de crues importantes, au printemps mais aussi à l’automne, ne sont pas là non plus sans répercussions pour la bonne réalisation des chantiers à ces périodes.
La question du régime hydrologique est une des questions préalables importantes à se poser lors de la conception d’un projet de génie végétal en rivière de montagne. Le niveau de l’eau pendant la saison de végétation peut en effet être très variable et conditionner à la fois les périodes de chantier, mais aussi le calage vertical des ouvrages de génie végétal. Il y a ainsi lieu de bien caler la hauteur des ouvrages afin d’éviter qu’ils ne soient immergés pendant une partie importante de la période de végétation. Par exemple, le calage vertical d’une fascine avec le niveau d’eau pendant la saison de végétation apparaît particulièrement important. Si elle est mal calée et trop longtemps immergée ou trop longtemps à sec, elle ne reprendra pas et les branches de saule ne survivront pas. La protection du pied de berge contre l’érosion arrêtera d’être fonctionnelle dès que la fascine aura disparu.
À noter que la contrainte du niveau d’eau élevé ou des variations fréquentes de hauteur d’eau (jour/nuit) en pleine période de végétation, est d’autant plus forte sur des cours d’eau canalisés et endigués. En effet, la réduction latérale du gabarit hydraulique, consécutif à la chenalisation, accentue les variations de niveau d’eau.
2.2.3.2. Contraintes liées à la neige et à la période de végétation
Les saules, très souvent utilisés en génie végétal, sont parmi les ligneux qui sortent les premiers du sommeil hivernal. Le débourrement de leurs bourgeons intervient fréquemment alors que la neige est encore présente au sol. Mais pour réaliser des travaux de génie végétal en altitude au printemps, il y a lieu d’attendre la fonte de la neige, pour des raisons pratiques et d’accessibilité. Survient alors le risque que le matériel végétal prélevé sur place ne soit plus en l’état de dormance. Or, la mise en place de boutures déjà feuillées risque de limiter leur taux de reprise.
Les périodes d’intervention pour les travaux en altitude sont soumises aux aléas hydrologiques et notamment aux fortes crues de printemps pour le régime nival. Dans ce dernier cas, une solution peut être de réaliser les ouvrages à l’automne pour éviter le risque hydrologique.
Il existe pourtant également un risque à réaliser les travaux à l’automne. En effet, les procédures liées à la mise en place des marchés et les aléas propres à l’installation du chantier conduisent fréquemment à un retard dans son démarrage. Ce retard est susceptible de poser problème en termes d’accès et de bon déroulement du chantier si la neige vient à faire une apparition marquée et durable. On prend alors le risque de devoir arrêter le chantier pour l’hiver, et d’être obligé de le reprendre lors de la crue de printemps… Il y a donc lieu d’être particulièrement vigilant sur les procédures et la rédaction des marchés de travaux. Le cas échéant, il peut être judicieux de reporter les travaux à l’année suivante.
