Recueil d'expériences techniques

Le caisson végétalisé à doubles parois
 
Il s’agit d’une structure bois constituée de plusieurs étages. Chaque étage est composé de deux rangées parallèles de rondins (longrines : rondins les plus longs et parallèles au sens d’écoulement des eaux) et de traverses ou moises (rondins plus courts et perpendiculaires au sens d’écoulement du cours d’eau). 
Le positionnement de l’ouvrage répond à des exigences précises conditionnant sa longévité et sa résistance mécanique. Ainsi, le niveau de crue annuelle doit arriver à la hauteur du premier étage du caisson et la géométrie de l’ouvrage doit suivre le profil en long du cours d’eau : une forme en escalier a été retenue. La structure est suffisamment en recul dans la berge pour ne pas occasionner un rétrécissement de la section d’écoulement. Pour ce faire, un relevé topographique précis ainsi qu’une étude hydraulique ont été menés.
 
Le calcul hydraulique des lignes d’eau et des forces tractrices sur un torrent en « step pool » de pente supérieure à 7 % comme le Bens est à la limite des connaissances scientifiques actuelles. 
 
Les modèles naturels, en amont, au droit et en aval des zones d’érosion, nous montrent une succession de seuils et de bassins. On trouve également en abondance des blocs de rocher en pied de berge. Ces blocs sont naturellement agencés pour former :
  des sortes d’épis rugueux ;
des « escaliers » ;
des assises et soutien de berge.
 
Il convient de prendre exemple sur ces modèles pour bâtir le projet.
 
La présence d’un enrochement latéral et en base de l’ouvrage protège la structure contre le phénomène d’affouillement. La profondeur d’ancrage (sous le lit) de l’enrochement a été calée sur la hauteur des seuils naturels présents dans le cours d’eau, ceci afin que l’ouvrage résiste même si un de ces seuils venait à se rompre en crue. Cette assise est constituée de blocs soigneusement agencés devant lesquelles sont disposés des épis en blocs plus volumineux.
 
Le remblai de la structure est composé de matériaux grossiers côté cours d’eau (1/4 de la largeur du caisson) afin de protéger le géotextile de l’abrasion en cas de crue et des rayons ultra-violets. Le 3/4 restant est remblayé à l’aide des matériaux issus du déblai pour permettre le développement des végétaux. Les boutures doivent traverser l’ensemble de la structure pour maximiser leur contact avec les matériaux terreux.
L’emploi de géotextiles de différentes natures se justifie par les diverses conditions d’utilisation. En pied, le géotextile doit être synthétique pour pallier l’absence de végétation. Le géotextile coco tissé à 940 g/m2 est utilisé pour les étages supérieurs du caisson et celui à 740 g/m2 est employé pour les lits de plants et plançons.
 
Remarques générales sur la végétalisation des caissons bois
 
La végétation, une fois bien installée, fournit un ombrage suffisant permettant de maintenir un taux d’humidité élevé au contact du bois, assurant ainsi une meilleure durabilité de la structure en bois. De plus, les végétaux produisent un effet de drain biologique par évapotranspiration, qui est bénéfique pour la stabilité de l’ouvrage à long terme, sans compter une meilleure intégration de l’aménagement dans le milieu naturel.
 
 
Fig. 46 - Construction du support du caisson en enrochement.Mode opératoire
 
L’ouvrage, ici destiné à renforcer les berges des cours d’eau, a une structure semblable à certains des ouvrages à doubles parois utilisés pour réaliser des seuils et barrages (chap. II.5). Il fonctionne comme une structure poids, c’est-à-dire dont le poids propre de l’ouvrage assure sa stabilité. Il est rempli de matériaux inertes pris sur place et associés à du géotextile synthétique et biodégradable, afin de limiter les phénomènes de lessivage ou de vidange.
 
 
Tab. 16 - Critères de pré-dimensionnement des caissons végétalisés de soutènement de berge.
 
Hauteur de l’ouvrage 1 m < H < 4 m
Profondeur d’ancrage minimum de l’ouvrage dans la berge P < 2 m
Diamètre des longrines (fonction de la disponibilité des bois locaux) Ø min < 15 cm
Diamètre des traverses (fonction de la disponibilité des bois locaux) Ø min < 15 cm
Diamètre des tiges métalliques (type fer à béton HA) pour assemblage des rondins Ø = 14 mm
Largeur de la base de l’ouvrage b < H/2
Fruit (inverse de la pente) du parement de l’ouvrage 0,2
 
 
Fig. 47 - L’ossature de l’ouvrage, avec les longrines parallèles au cours d’eau et les moises perpendiculaires.D’une manière générale, les ouvrages peuvent fonctionner seuls ou être végétalisés. Dans ce second cas, qui présente de multiples avantages pour l’ouvrage, la végétalisation peut s’opérer au fur et à mesure de la construction, en intégrant à chaque étage des plants en racines nues et des branches de saules, comme on le ferait pour des lits de plants et plançons. Si la construction se réalise hors des périodes favorables à la végétalisation, cette dernière peut se faire a posteriori, par bouturage entre les pièces de bois. Dans une telle configuration, la structure de l’ouvrage a pour objectif d’assurer un rôle de soutien immédiat, mais temporaire de la berge, le temps que la végétation soit suffisamment enracinée et puisse assurer seule cette fonction. 
 
Les caissons végétalisés présentent une rugosité latérale plus forte que certains ouvrages en enrochement ou les murs en béton. Ceci contribue à limiter les désordres liés au report d’érosion vers l’aval, couramment observés avec des ouvrages de rugosité inférieure.
 
 
réparation du terrain
 
Le caisson doit reposer sur une assise stable, régulière et nivelée. Cette assise doit également être consolidée, résistante et ne pas trop se déformer. Dans un lit présentant une granulométrie avec majoritairement des éléments grossiers (cailloux, galets), la préparation de cette assise peut se faire directement en terrassant le sol en place ou en mettant en place un enrochement. 
 
Pour une meilleure stabilité de l’ouvrage, l’assise doit présenter une pente de 5 à 10 % orientée côté berge pour un fruit total du parement de l’ordre de 0,2.
 
 
Mise en œuvre et phasage
 
Fig. 48 - Remplissage du caisson avec la terre végétale du site.Sur l’assise de fondation ainsi réalisée, on procède au montage des longrines et traverses (aussi appelées moises). Ici, les longrines au contact de l’enrochement ont été clouées dans les blocs à l’aide de tiges métalliques afin d’assurer une meilleure résistance de l’ouvrage, étant donné les fortes contraintes mécaniques imposées par le torrent.
 
À chaque étage de longrines, un géotextile est mis en place, dans lequel des matériaux terreux de remplissage doivent être tassés mécaniquement (godet de la pelle hydraulique ou rouleau). Un travail manuel complémentaire est nécessaire pour combler des vides sous les rondins.
 
Les traverses placées perpendiculairement sur les longrines sont fixées à l’aide de tiges d’acier d’armature dont le diamètre est de 14 mm au minimum. 
 
Fig. 49 - Mise en place des plançons et plants dans le caisson.Intercalés entre les longrines, des plançons de saules (ou des plants en racines nues d’autres espèces) sont couchés en rangs serrés. Les branches, de diamètre de 2 à 5 cm, peuvent avantageusement traverser toute l’épaisseur du caisson.
D’une manière générale, il est préférable de ne pas végétaliser la partie inférieure du caisson pour laquelle on pourra prévoir un parement en enrochement sec ou en géotextile synthétique. En effet, l’expérience montre que la végétation de la partie inférieure du caisson est souvent dominée par celle des parties supérieures et dépérit avec le temps (cela dépend toutefois fortement de l’exposition du caisson et de son inclinaison). Le dépérissement des végétaux des parties inférieures du caisson risque alors d’entraîner une vidange de celui-ci.
Lorsque des arrivées d’eau en amont de l’ouvrage sont détectées, un dispositif de drainage est à prévoir. Il peut être réalisé alors par une chemise drainante constituée de galets, de graviers ou de tout-venant grossier. Les plantes jouent cependant un rôle non négligeable de drainage grâce à leur système racinaire.
 
Si l’aménagement est réalisé sur un tronçon de grande longueur comprenant plusieurs éléments, on peut réaliser la continuité de l’ouvrage avec une reprise entre chaque élément sur un minimum de 50 cm. 
En sommet d’ouvrage, un géotextile biodégradable (type toile de coco ou de jute) peut être installé afin de protéger les semences et/ou les boutures du ruissellement. Ce géotextile doit être fixé à l’aide d’agrafes plantées dans le remblai.
 
Il convient de noter que la technique des caissons végétalisés doubles parois permet d’une part une stabilisation et une protection immédiates des berges (avant même une reprise efficace de la végétation). Elle permet d’autre part de traiter des berges quasiment verticales et de reprendre des surcharges importantes (poids lourds, etc.).
Il s’agit d’une structure souple supportant des petites déformations (notamment les tassements différentiels).
 
Fig. 50 - Assemblage de deux caissons.
 
 
Fig. 52 - L’ouvrage à la clôture du chantier.Fig. 51 - Coupe transversale de principe du caisson doubles parois végétalisé.