Recueil d'expériences techniques

6.5.1.  Méthodologie
 
6.5.1.1.  Présentation des sites d’étude
 
Le travail d’analyse de l’entomofaune s’est déroulé sur l’année 2009 et a concerné 15 aménagements de berges localisés en Rhône-Alpes. Les différentes techniques sélectionnées sont :
berges purement minérales : ouvrages en enrochement (5 ouvrages) ;
berges végétalisées avec enrochement de pied de berge et haut de berge végétalisé : ouvrages mixtes associant techniques minérales et végétales (5 ouvrages) ;
berges entièrement végétalisées : ouvrages constitués de fascines de saule en pied de berge avec bouturage (5 ouvrages).
 
 
6.5.1.2.  Relevés entomologiques
 
Fig. 11 - Pièges « cuvette jaune » Flora®.L’analyse s’est focalisée sur un ordre d’insecte : les coléoptères. La pertinence du choix des coléoptères en tant que bio-indicateur de la diversité floristique, de l’intégrité des processus hydromorphologiques et des habitats rivulaires a été maintes fois démontrée (Boscaini et al. 2000). La diversité taxonomique des coléoptères constitue un bon indicateur de la diversité des habitats représentés. L’ordre des coléoptères présente une grande variabilité morphologique qui témoigne d’une variabilité importante dans les régimes trophiques et fonctionnels (détritivores, phytophages, pollinophages, prédateurs carnivores, pollinisateurs, décomposeurs). Cette grande diversité leur permet d’occuper des milieux très variés, et notamment, pour certains d’entre eux, d’être tolérants aux régimes de perturbation des habitats rivulaires (Van Looy et al. 2005). 
 
L’échantillonnage des coléoptères aériens est basé sur un trait comportemental répandu chez les insectes : leur attirance pour le jaune. Beaucoup d’insectes volants, principalement les ordres des hémiptères, coléoptères et hyménoptères, sont attirés par la couleur jaune. L’échantillonnage a donc été réalisé grâce à des pièges type « cuvette jaune » couramment utilisés pour la détection des ravageurs et la protection des cultures (fig. 11). Deux pièges jaunes Flora® (Hébinger 1994) furent installés sur chaque site, sur le transect n° 2 (la partie médiane des berges).
 
 
6.5.2.  Résultats et discussions
 
Fig. 12 - Histogramme du nombre moyen de genres de coléoptères sur chaque type d’aménagement (Cavaillé et al. 2010).Le nombre moyen de genres de coléoptères aériens circulants sont présentés sur la figure 12. Ils sont répartis en fonction du type d’aménagement. Les aménagements issus des techniques de génie végétal comptent en moyenne 12,3 genres de coléoptères différents, 7,2 pour les aménagements en enrochement de pied de berge et seulement 3 pour ceux issus des techniques d’enrochement.
 
D’une manière générale, les populations de coléoptères et notamment les populations de carabes, sont sensibles à la structure de la végétation et à l’hétérogénéité des habitats. 
En milieu rivulaire, les niveaux élevés de diversité spécifique constatés sont essentiellement expliqués par une diversité importante des habitats représentés (Tews et al. 2004). Cette hétérogénéité est entretenue par les épisodes hydrologiques, notamment les crues, et par leur capacité à renouveler les mosaïques d’habitats. Des travaux témoignent de l’influence de l’intensité de la crue et affirment que les crues de petite et moyenne tailles ont une variabilité spatiale plus importante, créant ainsi plus d’hétérogénéité sur la berge (Helfield et al. 2007). En effet, les dégâts provoqués par une crue catastrophique ont pour conséquence de mettre le milieu à nu. Ceux provoqués par une crue de moindre ampleur engendrent une simple destructuration du milieu et ainsi une certaine hétérogénéité des habitats.
 
Fig. 13 - Apoderus coryli.Les espèces utilisées dans les différentes techniques de génie végétal jouent un rôle important dans la diversité de l’entomofaune. Ainsi, la fascine de saule couplée au lit de plants et plançons permet la production d’une quantité importante de branches et de ramilles, notamment de saules. Or, le genre Salix dans son ensemble constitue une source importante en nectar et pollen qui a pour avantage d’arriver très tôt dans l’année (février-avril), au moment où ces ressources sont rares et difficiles à obtenir. Cette source de nourriture a pour effet d’attirer de nombreux insectes qui peuvent, à terme, s’installer de manière durable dans les saulaies. Il a par exemple été montré que 5 espèces de saules pouvaient abriter à elles seules 450 espèces d’insectes (Sommerville 1992).
Les saulaies reconstituées dans le cadre des aménagements de berges par des techniques de génie végétal présentent une biomasse élevée, ce qui explique une diversité plus importante en coléoptères observée sur les ouvrages issus du génie végétal par rapport à ceux comportant de l’enrochement.