Guide des espèces

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3.2.1. Répartition et autécologie des espèces

Aménager à l’aide de techniques de génie végétal signifie « introduire » des végétaux dans un milieu récepteur. Il est clair que l’efficacité de l’ouvrage dépendra d’une croissance saine et vigoureuse des végétaux choisis, autrement dit, de leur comportement face aux conditions de croissance.
 
 
3.2.1.1 Distribution géographique et altitudinale
 
Les distributions géographique et altitudinale naturelles des espèces végétales résultent d’un long processus d’adaptation aux conditions climatiques et à l’ensemble des conditions de croissance à l’échelle d’une région biogéographique. Le respect de ces distributions naturelles dans le choix des espèces à utiliser doit figurer comme un principe fondamental, non seulement pour s’assurer de l’adaptation des espèces utilisées, mais également d’un point de vue éthique, pour ne pas participer à la modification des aires naturelles, ceci même si certains végétaux pourraient potentiellement présenter toutes les garanties de reprise. Pour illustrer ce propos, citons le cas de l’aulne de Corse (Alnus cordata), bien trop souvent utilisé dans l’aménagement des berges de cours d’eau en milieu naturel sur le continent (en milieu urbain, les critères liés à la provenance des plantes sont moins pertinents).
 
Au-delà de ce niveau taxonomique, ce principe s’applique aussi au rang infraspécifique. En effet, les espèces à larges amplitudes géographique et altitudinale sont généralement privilégiées dans les aménagements, mais cela ne doit pas faire oublier les spécificités régionales et l’existence de taxons infraspécifiques. C’est le cas notamment du saule pourpre (S. purpurea), du saule noircissant (S. myrsinifolia), de l’anthyllide vulnéraire (Anthyllis vulneraria), du liondent hispide (Leontodon hispidus) ou encore du lotier corniculé (Lotus corniculatus), espèces polytypiques présentant des taxons infraspécifiques ayant des exigences écologiques spécifiques (chap. III.4).
 
L’anthyllide vulnéraire est une légumineuse clé pour le génie végétal. Elle présente, dans les Alpes du Nord, une très grande diversité infraspécifique avec 6 sous-espèces indigènes parmi les 27 actuellement recensées en Europe. Si certains de ces taxons sont rares, comme les sous-espèces guyoti, polyphylla et vulnerarioides, d’autres sont plus fréquents et sont structurants des pelouses sèches ou d’altitude, comme les sous-espèces alpestris, carpatica et valesiaca (fig. 2b et chap. III.4). La connaissance de la distribution altitudinale et de l’écologie de ces sous-espèces devient alors un élément important pour la composition du mélange grainier et, par voie de conséquence, l’optimisation des possibilités de développement des plantes et la réussite d’un ouvrage.
 
Bien que régulièrement semée, la sous-espèce type (subsp. vulneraria) ne devrait pas être utilisée dans les Alpes du Nord occidentales puisqu’elle n’est pas indigène sur ce secteur.
 
 
3.2.1.2. Conditions édaphiques
 
Au-delà de l’altitude et du climat, étroitement liés, les caractéristiques physico-chimiques du sol, notamment son niveau d’hydromorphie, sa granulométrie et sa nature chimique (pH, éléments nutritifs), sont des critères particulièrement importants pour le choix des végétaux.
 
Les espèces présentant une large amplitude écologique sont évidemment beaucoup plus souples d’utilisation. Elles sont notamment susceptibles de trouver une place à plusieurs niveaux dans un profil de berge à aménager. C’est le cas notamment de certaines espèces ligneuses comme le bouleau pendant (Betula pendula), l’érable sycomore (Acer pseudoplatanus), le frêne (Fraxinus excelsior), le saule pourpre (Salix purpurea), le saule drapé (S. elaeagnos) ou d’espèces herbacées telles que l’anthyllide vulnéraire (Anthyllis vulneraria) ou l’avoine jaunâtre (Trisetum flavescens – chap. III.4). Ces espèces peuvent ainsi être implantées sur divers types de substrats, du pied jusqu’en sommet de berge.