Guide des espèces
Les critères liés à la morphologie et à la physiologie des espèces ne sont pas les seuls à entrer en considération dans le choix des végétaux. Le statut des espèces utilisées (protection et vulnérabilité) ainsi que la valeur biologique, écologique et paysagère de l’aménagement sont également à considérer.
 
 
3.2.3.1. Abondance et statuts
 
Au sein de l’Arc alpin, le statut des espèces peut être très différent d’une région à l’autre. La législation sur les espèces protégées diffère ainsi d’un pays à un autre, mais aussi d’une région administrative à une autre (législation cantonale, régionale ou départementale). Le niveau de protection de chaque espèce peut également varier en fonction de l’espèce considérée (protection partielle ou totale en Suisse, protection stricte ou régime d’autorisation en France). Dans certains cas, des autorisations de récolte peuvent être demandées aux autorités compétentes. Il est donc nécessaire de s’informer et de ne pas envisager des prélèvements en milieu naturel pour les espèces vulnérables ou bénéficiant d’un statut de protection. 
 
Notons toutefois que les règlements ne tiennent pas compte du fait qu’un prélèvement de segments de tiges aériennes, sur une espèce capable de reproduction végétative, ne remet pas en cause l’existence de la plante. L’opération favorise même sa propagation et, dans une certaine mesure, sa vitalité. Cet argument peut, dans certains cas, motiver une demande d’autorisation de récolte de certaines espèces protégées.
 
Pour plus d’informations sur la protection des espèces végétales (cadre légal, listes des espèces, demandes d’autorisation), se référer aux liens suivants :
http://www.cps-skew.ch/cadre_legal/plantes_protegees.html
http://www.developpement-durable.gouv.fr/-Faune-et-flore-.html
Les sites suivants permettent également d’obtenir une information détaillée espèce par espèce :
http://inpn.mnhn.fr/accueil/index
http://www.infoflora.ch/fr/flore/
 
Par ailleurs, certaines espèces ne bénéficiant pas d’un statut de protection peuvent être rares à l’échelle locale. On évitera donc de les utiliser en grande quantité dans des projets d’aménagement, ne serait-ce que pour ne pas rendre trop contraignante la recherche de fournitures lorsqu’elle consiste en un prélèvement en milieu naturel.
 
Il est enfin important de noter qu’il existe, en France comme en Suisse, une législation spécifique sur la production et la commercialisation des graines, semences et plants forestiers.
 
La directive européenne 99/105 réglemente la commercialisation des graines et plants forestiers. Cette réglementation a été transposée en droit français dans le Code forestier (articles L. et R. 153 et suivants). Les espèces réglementées (bénéficiant d’une traçabilité sur l’origine) sont listées dans l’annexe 1 de l’arrêté ministériel modifié du 24 octobre 2003 relatif à la commercialisation des matériels forestiers de reproduction (MFR). En Suisse, l’ordonnance sur le matériel forestier de reproduction du 29 novembre 1994 fixe elle aussi une liste d’espèces faisant l’objet d’un certain nombre de restrictions quant à leur production et commercialisation. Cette réglementation est traduite de manière plus ou moins similaire en France et en Suisse. Elle s’applique aux semences, plants ou parties de plantes destinés à des fins forestières et permet de mettre en place une chaîne de traçabilité sur l’origine des MFR (du lieu de récolte au lieu de plantation). Elle permet ainsi aux utilisateurs d’avoir l’assurance qu’ils ne sont pas trompés par leurs fournisseurs sur l’origine et la qualité des graines et plants achetés pour leurs plantations. Celles-ci sont considérées comme ayant des fins forestières lorsqu’elles sont réalisées dans des conditions techniques compatibles avec la production de bois à titre principal ou lorsqu’elles sont susceptibles d’avoir un impact sur les ressources génétiques des arbres forestiers. Dans ce cadre, les ripisylves font partie intégrante du territoire forestier national, aussi bien en Suisse qu’en France. Ces réglementations prévoient plusieurs catégories (sélectionnée, qualifiée, testée et identifiée) pour lesquelles les niveaux d’exigence sont variables.
 
Concernant les plantes herbacées, la directive européenne 66/401 réglemente la production en vue de la commercialisation de semences de plantes fourragères à l’intérieur de la Communauté. Cette directive est traduite par différents textes de droit français, dont le règlement technique annexe des semences certifiées de plantes fourragères homologué par arrêté ministériel du 29 juin 2010, et l’arrêté de commercialisation du 15 septembre 1982 relatif à la commercialisation des semences fourragères. Pour un certain nombre d’espèces listées dans cet arrêté, il est interdit de commercialiser des variétés autres que celles qui sont certifiées. Cela signifie que, pour ces espèces, l’on ne peut utiliser que des semences ayant fait l’objet d’une certification même si ces variétés n’ont pas nécessairement les caractéristiques écologiques requises, notamment vis-à-vis de l’altitude. Une telle réglementation existe également en Suisse (ordonnance du DFE sur les semences et plants du 7 décembre 1998). Toutefois, en Suisse, celle-ci ne s’applique pas aux mélanges de semences destinés à des utilisations autres qu’à des fins d’affouragement (comme par exemple la stabilisation des talus et berges de cours d’eau).
 
Des informations détaillées sur ces réglementations sont accessibles aux adresses suivantes :
http://agriculture.gouv.fr/Presentation-de-la-reglementation
http://www.admin.ch/ch/f/rs/921_552_1/index.html
 
 
3.2.3.2. Fonctions annexes
 
Bien que l’efficacité technique d’un ouvrage de génie végétal représente toujours l’objectif prioritaire d’un aménagement, la structure végétale mise en place peut également assurer d’autres fonctions. Considérées comme annexes, elles contribuent à la création de structures privilégiées pour les déplacements de la faune (fonction de corridors), de zones de refuge temporaire, de garde-manger ou de sites de reproduction, voire même de milieu vital à part entière. L’importance plus ou moins prononcée de ces fonctions, qui influenceront également le choix des végétaux, dépend notamment des dimensions de l’aménagement et de sa localisation géographique.
 
Les aménagements constituent ainsi des réservoirs d’espèces végétales, animales et fongiques et contribuent pleinement à la conservation de la biodiversité, assurant une plus-value biologique et écologique à la fonction mécanique première.
 
Le génie végétal permet également une intégration paysagère des ouvrages de protection contre les crues, du moins en milieu naturel et semi-naturel ; intégration qui sera d’autant plus réussie si la référence aux modèles naturels est effective et si un effort de diversification est réalisé au niveau du choix des végétaux.
 
Dans des contextes particuliers, notamment en espace bâti, la valeur paysagère de l’ouvrage peut également être prise en considération, en favorisant certains types de feuillages ou des espèces présentant des floraisons ou fructifications abondantes et/ou de haute valeur ornementale : floraisons du saule faux daphné et du merisier à grappes, feuillages luisants du saule laurier et du saule faux daphné, feuillage léger du saule drapé, fructifications de l’épine-vinette ou du sorbier des oiseleurs, couleur automnale des feuillages de l’érable sycomore et du merisier à grappes, etc.
 
 
3.2.3.3. Recherche de diversité
 
Fig. 10 - L’aménagement des sommets de berge sur des substrats grossiers et filtrants nécessite une adaptation de la composition botanique à la xéricité de l’endroit, et l’implantation d’espèces mésophiles, voire xérophiles, même en contexte alluvial.Lorsque les techniques mises en œuvre le permettent et que les conditions locales le justifient, la diversification des espèces utilisées est hautement recommandée. Elle permet de mieux remplir ces fonctions qualifiées de secondaires et d’obtenir des formations végétales présentant une diversité spécifique mais aussi structurelle. Si certaines techniques se prêtent particulièrement à la diversification (par ex. les lits de plants et plançons), de simples plantations peuvent accompagner d’autres techniques pour satisfaire cet objectif.
 
Ce sont souvent les conditions de croissance, variant très fortement dans le profil transversal allant du pied jusqu’au sommet de berge, qui imposent la nécessité d’élargir le choix des végétaux (fig. 10). Une plus grande diversité végétale constitue ainsi une forme d’assurance lorsque les conditions de croissance sont hétérogènes. On garantit ainsi une quantité suffisante de végétaux présentant une croissance vigoureuse, assurant ainsi l’efficacité de l’ouvrage.