Guide des espèces
Fig. 1 - Port en cépées denses.
Fig. 3 - Bourgeons appliqués et rameau présentant des plaques décolorées blanchâtres.
Fig. 2 - Rameau de l’année brun chocolat, cannelé au sommet.
Fig. 5 - Feuille vert clair à glauque au revers.
Fig. 4 - Feuille vert foncé et luisante dessus.
Fig. 7 - Chaton femelle lâche, porté par un pédoncule feuillé.
Fig. 6 - Chaton mâle grêle et allongé.
Fig. 8 - Situation typique en contexte alluvial sur matériaux fins (Salicetum triandrae).
Salix triandra L.

Saule à trois étamines

Salicacées

Description : 
- Le saule à trois étamines est un arbuste caducifolié dépassant rarement 5 m de haut et formant des cépées denses (fig. 1).
- Les rameaux de l’année, généralement brun chocolat à brun rougeâtre, sont glabres, cannelés au sommet (fig. 2) et souvent pourvus de plaques décolorées blanchâtres (fig. 3). L’écorce âgée, généralement gris verdâtre, s’exfolie par plaques laissant alors visible un tronc couleur cannelle.
- Les bourgeons, plan-convexes, sont appliqués sur les rameaux (fig. 2 et 3). Ils sont 2 à 4 fois plus longs que larges et mesurent de 3 à 6 mm. 
- Les feuilles, lancéolées, denticulées-glanduleuses, mesurent de 5 à 10 cm. Elles sont 3 à 5 fois plus longues que larges, glabres, vert foncé et luisantes dessus (fig. 4), plus claires ou un peu glauques au revers (fig. 5). Les stipules, longtemps persistantes, sont arrondies.
- Les fleurs, protégées par une écaille jaunâtre non barbue, sont rassemblées en chatons grêles et allongés, dressés à étalés et portés par un pédoncule feuillé. Les fleurs mâles sont composées de 3 étamines libres (fig. 6). Les fleurs femelles sont constituées d’une capsule glabre longue de 4 à 6 mm surmontée d’un style court (fig. 7).
- La floraison a lieu de mars à juin, avant ou pendant la feuillaison.
- Deux sous-espèces sont décrites à ce jour :
subsp. discolor aux feuilles blanchâtres ou glauques dessous ;
subsp. triandra aux feuilles vert pâle dessous.
- Le saule à trois étamines peut être confondu avec le saule faux daphné (S. daphnoides), aux rameaux de l’année non cannelés à leur extrémité et aux fleurs mâles composées de seulement 2 étamines. Il peut également être confondu avec le saule laurier (S. pentandra), aux feuilles visqueuses odorantes à l’état jeune et aux bourgeons foliaires à apex non appliqué sur les rameaux.
 
Distribution et vulnérabilité : 
Le saule à trois étamines est une espèce eurasiatique assez largement répandue sur le territoire franco-suisse. Il est commun dans les Alpes du Nord, notamment aux abords des vallées préalpines.
 
La distribution des deux sous-espèces (non distinguées en Suisse) n’est pas encore totalement connue.
 
Écologie : 
- Le saule à trois étamines est une espèce pionnière formant des saulaies arbustives aux abords des cours d’eau. Régulièrement associé au saule blanc (S. alba)  à basse altitude, il s’efface petit à petit au profit de ce dernier dans les formations forestières.
- Il croît sur des matériaux alluvionnaires plutôt fins (argiles, limons, sables), généralement calcaires, neutres à basiques, plus ou moins riches en nutriments et régulièrement inondés (sols frais à humides suivant les fluctuations de la nappe). 
- Il présente un optimum écologique au sein des saulaies alluviales sur matériaux fins (Salicetum triandrae – fig. 8).
- Il se développe de l’étage collinéen à l’étage subalpin inférieur (jusqu’à 1 700 m).
 
Utilisation en génie végétal : 
Le saule à trois étamines est une espèce régulièrement utilisée en génie végétal, notamment pour la stabilisation des berges des cours d’eau de basse altitude. Il offre également de nombreuses potentialités pour une utilisation en rivière de montagne.
 
Dotée d’un fort pouvoir de régénération (rejets de souche) et d’une croissance juvénile rapide, cette espèce vigoureuse couvre et protège rapidement le sol. Avec son port buissonnant dépassant rarement 5 m de haut et sa tolérance à la submersion, elle est particulièrement adaptée pour être implantée en pied de berge. Dans ces conditions, la fragilité de ses rameaux favorise un recépage permanent sans diminuer la vitalité des plants, induisant ainsi la formation de buissons denses permettant de dissiper l’énergie du courant et de piéger les sédiments fins. Dotée d’une forte capacité d’évapotranspiration (Zouaoui 2011), elle est également adaptée pour drainer les berges et talus soumis à des infiltrations d’eau.
 
Compte tenu de son écologie, il est déconseillé de l’implanter sur des substrats grossiers drainants, dans des conditions d’ombrage trop important (vallées encaissées, pentes fortement boisées, végétation arborée dense) ou à des altitudes supérieures à 1 500 m. Elle tolère toutefois relativement bien l’acidité du sol et peut être utilisée sur des substrats siliceux, pour peu que ceux-ci soient suffisamment riches en matériaux fins (Hytonen et Saarsalmi 2009).
 
Étant donné la taille de ses rameaux et son taux de reprise élevé au bouturage (supérieur à 70 % quelles que soient les conditions), cette espèce peut être utilisée sous forme de boutures, de plançons ou de ramilles. Elle peut ainsi facilement être intégrée dans un grand nombre d’ouvrages de génie végétal (lits de plants et plançons, caissons en rondins végétalisés, fascines de saules, couches de branches à rejets, bouturage). Ses branches cassantes limitent toutefois son utilisation pour certaines techniques, notamment le tressage. Développant un système racinaire plutôt superficiel (rapp. vol. syst. sout./aérien = 0,4), elle devra être associée à d’autres saules buissonnants ou arbustifs à système racinaire plus profond comme les saules pourpre (Salix purpurea) ou noircissant (S. myrsinifolia). Il est aussi intéressant de noter que cette espèce tolère bien les tailles d’entretien (recépage, création de saules têtards) et l’abroutissement, notamment par le castor.
 
Le saule à trois étamines est disponible dans le commerce. Compte tenu de la présence de nombreux cultivars ornementaux (« Black Hollandens », « Light Franck », « Noire de Villaine », etc.), une attention particulière devra être portée à la provenance des plants. Étant donné sa relative abondance aux abords de certains cours d’eau, il est préférable de se procurer le matériel végétal à proximité des chantiers (boutures), garantissant alors l’utilisation de souches locales.
 
Le saule à trois étamines bénéficie d’un statut de protection dans certains cantons suisses (protection totale ou partielle).